Pas encore officiellement candidat, mais déjà certain de l’être. François Bayrou se prononcera début décembre, laisse-t-il entendre. En attendant, voici donc l’amorce d’une campagne, avec à l’agenda deux déplacements par semaine, dont le cadre est le suivant: à chaque déplacement, son thème (autant que possible, lié à l’un des trois piliers du projet de François Bayrou: produire, instruire et construire la démocratie), ses visites et son dialogue direct. Jeudi dernier, le Cantal, sur le thème «instruire». Ce lundi, direction la Loire et Saint-Étienne pour parler de sport.
Côté militants, on regarde aussi vers 2012, et plus loin encore. «Le MoDem n’existera l’année prochaine que si François Bayrou gagne la présidentielle. Sinon, c’est mort.» Les propos de Christophe Azanza, responsable du MoDem du Gers, sonnent presque comme un ultimatum. Si tous les militants du Mouvement démocrate qui ont répondu à Mediapart ne le formulent pas ainsi, tous, en revanche, s’accordent à dire que l’année à venir est décisive. Comment le MoDem aborde-t-il les prochaines échéances électorales? Avec quelles forces? Quelles faiblesses? Revue de détail, état des troupes, après un tour de France des mouvements départementaux.
«On est un peu dans les starting-blocks, on attend qu’il donne le départ», s’enthousiasme Pierre Lagonelle, du MoDem des Hautes-Pyrénées. L’université d’été du parti à Giens, en septembre, a été une réussite du point de vue des militants. Le discours de François Bayrou a galvanisé les troupes, désormais en ordre de bataille: «C’est vrai qu’il a changé: parfois on se disait « qu’est-ce qu’il est chiant, c’est soporifique », mais là, à Giens, ce n’était paJérôme Sourisseau, maire de Bourg-Charente et conseiller général de Charente, l’a remarqué sur le terrain: «Il y a un changement de comportement depuis la rentrée.» Et selon lui, ce sont les effets conjugués du livre programmatique de François Bayrou (2012 État d’urgence, vendu à plus de 35.000 exemplaires, selon la communication de François Bayrou) et de l’université de rentrée.
«Il y a des propositions, ça a interpellé les gens. Fin août, en Charente, on a organisé le pique-nique du MoDem, et à ma grande surprise, beaucoup de maires et d’élus m’ont répondu en manifestant leur soutien, même s’ils ne pouvaient pas être présents.» Le maire de Bourg-Charente croit à «un début d’engouement, une bonne spirale».
Une rentrée qui rappelle les jours heureux du MoDem. Quand le parti attirait et enivrait. Comme lors de son lancement en 2007, le Mouvement démocrate recommence à susciter de l’intérêt. «Cet élan est en train de revenir», constate Christine Espert, conseillère municipale d’opposition à Pia (mairie socialiste, Pyrénées-Orientales).
À l’autre bout de la France, dans la Marne, même constat de Nicolas Schmidt: «J’observe que les gens qui se sont éloignés en 2007 cherchent à nous rejoindre, en se disant que François Bayrou est celui qui apporte le plus de réponses.» Il en veut pour preuve la présence à Giens d’Anne-Marie Idrac, ex-secrétaire d’État de Nicolas Sarkozy, ou celle de Jean Peyrelevade, un temps resté à distance du MoDem. […]
18,57% en 2007, combien aujourd’hui?
Bien que le MoDem soit prêt à dégainer slogans, tracts et arguments de campagne, la traversée du désert a laissé des traces, un traumatisme. Souvenir douloureux pour Pascal Landréat, maire de Pont-Sainte-Marie dans l’Aube: «Ça nous a perturbés: vous faites 18%, vous êtes euphorique et puis la semaine suivante, ça retombe parce qu’on n’a pas pris position.»
Une erreur de communication d’ailleurs, selon Bruno Tabary, de la fédération des Yvelines. Mais d’autres, comme Serge Gaubier, le justifient: «On peut être indépendant et avoir une action politique, soit en étant au second tour, soit en faisant des alliances. Mais pour ça, il fallait impérativement prouver qu’on était indépendant.»
Aujourd’hui, pas de doute et soulagement général: «Plus d’indépendance absolue, non, car la situation est telle que François Bayrou prendra ses responsabilités», observe le Charentais Jérôme Sourisseau. Pierre Lagonelle: «Bayrou l’a bien compris puisqu’il appellera à voter pour un candidat. Donc aujourd’hui, oui, il faut s’allier avec d’autres, car le MoDem ne fera pas 50%, mais ce ne sera pas du débauchage comme Nicolas Sarkozy avec les ministres d’ouverture. Nous, on n’est pas achetables, ce sera pour une proximité de projet.»
Il en va de l’avenir du MoDem, via cette présidentielle, mais aussi, et surtout, les législatives qui suivront. «Il y a une réalité: si on refait cinq ans seuls contre tous, je ne suis pas sûr qu’on survive. On s’est endurcis, mais ça fragilise et ça fatigue aussi», constate Adrien Debever, du MoDem girondin.
Source : Médiapart du 23/10/2011