Il y a deux jours, Michel Rocard (encore un mercenaire people du gouvernement) a remis son rapport sur la mise en place d’une taxe carbone pour 2010.
L’objectif annoncé est de respecter l’engagement de la France qui consiste à diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050. Cette nouvelle taxe doit ainsi inciter les consommateurs à adopter des comportements plus vertueux d’un point de vue écologique en agissant sur les prix. Les produits visés seront ceux basés sur les énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon), c’est-à-dire pour les ménages : le prix du chauffage au gaz (environ + 15%) et le prix du carburant à la pompe (environ + 8 centimes).
Si on décrypte cette nouvelle taxe présentée comme vertueuse, on pourrait bien trouver là un nouvel impôt très injuste.
En effet, qui seront les principales victimes de cette taxe ?
Les conducteurs de voiture, principalement dans le monde rural où les alternatives n’existent pas et où les distances peuvent être importantes. Ainsi que les foyers se chauffant au gaz et au fioul.
Or, dans ces deux cas, ce sont les foyers les plus modestes et les classes moyennes (basses) qui seront touchés de plein fouet. Ceux qui n’ont pas les moyens d’acheter des voitures moins gourmandes, ceux qui n’ont pas les moyens de financer des travaux d’isolation et de chauffage durable et enfin tous ceux qui n’ont pas accès à la propriété immobilière et qui sont des locataires dépendants du bon vouloir d’un propriétaire.
Par ailleurs, cette taxe portant sur la consommation d’éléments essentiels (logement et transport) sera proportionnellement d’avantage supportée par les ménages les moins riches, puisque leur budget est en grande partie consacré à la consommation, contrairement à celui des plus riches (qui épargnent plus).
Alors bien sûr, en bon socialiste français, Michel Rocard évoque la possibilité de reversement vers les plus fragiles sous forme de « chèque vert ». Non seulement ces chèques sont loin d’être acceptés par le gouvernement (Eric Woerth en tête) mais c’est toujours le même processus archaïque de la gauche française : on ponctionne d’abord avant de rendre l’argent mais par le biais de l’assistanat…
A ce petit jeu, selon Michel Rocard, toutes les sommes récoltées seront redistribuées aux contribuables (encore une fois ce n’est sûrement pas le but du gouvernement) mais il y aura à coup sûr un perdant : la classe moyenne (qui endosse ce rôle trop souvent depuis 30 ans), qui n’aura pas droit aux compensations (pas assez pauvre !) et qui n’aura pas les moyens d’éviter la taxe (pas assez riche pour des investissements lourds dans leur logement ou leur voiture).
En résumé, cette taxe est surtout un impôt nouveau qui sera injustement supporté par la classe moyenne et les plus fragiles. Les compensations éventuelles ne seront pas durables ni suffisantes, elles seront l’objet de frais de fonctionnement et de gaspillages inévitables, voire de logiques électoralistes.
L’objectif de protection de la nature ressemble plus à un prétexte inespéré pour le gouvernement pour faire passer un nouvel impôt dont il a bien besoin en ces temps de déficit public abyssal.
Car du point de vu de la baisse des émissions de CO², cette taxe risque d’être très peu efficace : la plupart des redevables ne seront pas en mesure de modifier leur mode vie soit pour des raisons financières soit pour des raisons géographiques.
Pour faire baisser les émissions de CO², il y a des actions bien plus pertinentes qu’une taxe. Ainsi contre la pollution automobile :
- Continuer à développer, dans les grandes villes, des tramways qui empêchent structurellement l’accès des voitures au centre ville tout en offrant une alternative de déplacement.
- Aider et inciter la recherche dans le domaine des véhicules propres. La voiture n’est pas un mode de déplacement à bannir, en particulier dans la ruralité, mais il faut à terme qu’elle ne fonctionne plus au pétrole.
- Développer des infrastructures de substitution pour le transport longue distance de marchandise, en particulier privilégier le ferroutage aux camions.
Concernant les émissions de CO² issues des logements, l’évolution ne peut être que très progressive pour le bâti mais peut être rendue obligatoire pour les constructions à venir (les surcoûts pouvant être absorbés par les économies d’échelle). Dans ce domaine, il faut sans doute privilégier des actions incitatives (exonérations fiscales, qui ont déjà un réel succès) plutôt que les punitions fiscales.
Enfin, l’idée d’une taxe carbone reste intéressante mais avec une définition, un cadre et un ciblage tout à fait différent. Elle peut être l’outil d’un système très ambitieux avec à terme une moralisation de la production mondiale…mais cela est un vaste sujet qui mérite un article à part entière… A suivre.
Adrien Debever