Bordeaux école de management organisait hier soir un débat entre jeunes politiques de différents partis.
A68 jours du premier tour de la présidentielle, l’association des élèves de Bordeaux école de management a eu l’idée d’inviter les représentants des principaux mouvements politiques de jeunes pour un débat dans le grand amphithéâtre. Il y avait là Benjamin Lancar, président des jeunes populaires (UMP), le plus connu parce que souvent invité des médias ; Rama Sall, du mouvement des jeunes socialistes, même prénom et même couleur de peau que l’ex-ministre mais tout aussi percutante sur certains sujets ; Wandrille Jumeaux, le représentant des écologistes, quelque chose de Besancenot dans l’allure et le verbe mais en plus vert ; le Bordelais Adrien Debever (Modem), local de l’étape et le plus vieux du plateau avec ses 33 ans ; Maxime Verner, non inscrit mais, supériorité manifeste, seul du lot à être candidat à la présidentielle et en quête de parrainages (il en est à 350) ; enfin Julien Rochedy (Front National), bien décidé à jouer le « bad boy » de la soirée, curieusement placé un peu à l’écart des autres fauteuils, juste devant un panneau haute tension, par une intention sans doute involontaire des organisateurs, quoique plaisante. Il manquait seulement un jeune du Front de gauche, peut-être par un souci d’équilibre, puisqu’au tandem PS-Vert répondait celui de l’UMP et du FN avec au milieu le Modem et le non inscrit. Une absence malgré tout préjudiciable à la cohérence du débat.
Argumentaire clé en mains
De fait, le trublion de service fut le FN Julien Rochedy, très acide envers Benjamin Lancar alors que Rama Sall et Wandrille Jumeaux étaient manifestement en phase pour lui donner la réplique. Debever, en déjà vieux sage, tenta bien d’apporter le calme et la sérénité du centriste dans un débat parfois passionné, au risque de devenir un peu décalé dans l’atmosphère. Car le jeune public d’étudiants commerciaux, certes moins vindicatif que celui d’un amphi de socio, était quand même venu pour voir un peu de sang.
Force est de constater qu’il y en eut peu. Le débat commença sur les finances et les intervenants rivalisèrent d’analyses, montrant qu’ils connaissaient parfaitement leurs dossiers, ou plutôt leur argumentaire fourni clé en mains. En les écoutant, on pensait à ces matchs de juniors dans certains sports : même jeu, mêmes règles, mêmes maillots que les grands mais un manque de volume physique et de technique pour faire aboutir les intentions. Pas si simple de débattre en public de sujets aussi complexes que la mondialisation, le désendettement, la croissance, le chômage etc. Il faut plus que des heures de cours et de formation au sein des partis pour rendre le discours parfaitement intelligible.
Quelques bonnes formules tout de même comme celle d’Adrien Debever répondant à Julien Rochedy sur la régulation de l’économie : « On régule ? On recule plutôt. » Ou quand Wandrille Jumeaux répliqua sèchement à Benjamin Lancar qui venait de vanter la politique des heures supplémentaires : « Et tu leur dis quoi à ceux qui sont au chômage à cause de tes heures sup défiscalisées ? »
« Xénoméfiance »
Le seul moment où les débatteurs donnèrent vraiment l’impression d’être jeunes, ce fut quand l’immigration vint sur le tapis. Le représentant du FN joua parfaitement son rôle de provocateur façon Le Pen en qualifiant l’écologiste de « Robin des bois » et en parlant de « fermer et ouvrir les fenêtres » de l’immigration en fonction des besoins de la France. La militante du MJS lui cria son indignation et se fit applaudir. Le candidat non inscrit parla joliment de « xénoméfiance ». L’homme de l’UMP se laissa traiter de laxiste par celui du FN, citant les « 200 000 personnes qui arrivent chaque année en France et que nous n’avons plus les moyens de recevoir ». Osé devant un public où les étudiants étrangers étaient en nombre conséquent.
Mais en école de commerce (surtout pour les concours préalables), on apprend à conserver une certaine retenue et tout compte fait, la soirée se déroula dans un climat de bon aloi.
Source : Sud Ouest du 15/02/2012